L'éruption sommitale qui a commencé le 30 août 2006 s'est terminée le 1er janvier 2007, et a été la plus longue depuis l'éruption de mars 1998. La sismicité enregistrée au niveau du Piton de la Fournaise a repris à la fin du mois de janvier, annonçant une nouvelle éruption. Du 1er janvier au 18 février, les inclinomètres ont enregistré une augmentation de pente dans la partie nord de l'Enclos Fouqué. Le 18 février à 12h15 TU (Temps Universel), 97 séismes ont été enregistrés en 12 minutes sous le sommet et une fissure s'est ouverte à 12h40 au sommet du Piton, traversant d'est en ouest le cratère Dolomieu. Après 8 heures d'activité effusive et l'émission de moins de 1 Mm3 de lave, le trémor éruptif a disparu à 22 heures. Au cours de l'éruption, le cratère Dolomieu a été complètement rempli par la lave, qui a fini par déborder côté est à la fin de l'éruption massin2009.
Durant la semaine suivant cette éruption, aucun séisme n'a été enregistré, mais l'inflation du sommet amorcée au début de l'éruption a continué et a été enregistrée par GPS : la station BORg s'est déplacé de 1,5 cm vers l'ouest entre le 20 février et le 30 mars (Fig. 7.1). La sismicité a repris le 28 février, puis une nouvelle crise sismique s'est déclarée le 30 mars à 16h23 TU sous le nord-est du sommet, se décalant vers le sud-est. Une fissure éruptive s'est ouverte à 19h00 TU à 1900 mètres d'altitude sur le flanc sud-est du cône, produisant une coulée de lave aphyrique. Cette éruption a pris fin quelques heures après, le 31 mars à 5h15 TU, et aura émis un volume de lave inférieur à 1Mm3 [Massin (2009)].
Les déformations enregistrées pendant les 15 premières minutes de la crise sismique montrent une inflation généralisée du sommet (BORg se déplace de 3,5 cm vers l'ouest), suivie par une déflation du sommet alors que les GPS de la base du cône (FJSg, FORg, FERg) ont enregistré des déplacements vers le sud-est peltier2009b,staudacher2009. Ces déplacements sont interprétés par [Peltier et al.(2009b)] comme la déformation générée par l'injection d'un même dyke, alimentant d'abord l'éruption de mars puis l'éruption d'avril.
L'éruption proximale du 30 mars n'a arrêté ni la sismicité, ni la déflation du sommet, visible sur tous les GPS sommitaux [Peltier et al.(2009b),Staudacher et al.(2009)]. À partir du 31 mars, la sismicité sous le sommet s'intensifie et une troisième phase éruptive débute le 2 avril à 6h00 TU. L'éruption est distale et la fissure éruptive est localisée dans la partie sud du Grand Brûlé à 550 mètres d'altitude, à une centaine de mètres du Rempart du Tremblet. La lave émise est alors aphyrique et elle rejoint la mer rapidement. Du 2 au 5 avril, la sismicité, le trémor et le débit de lave s'intensifient.
Le 5 avril à 20h49 TU, un événement sismique de magnitude 3.2 s'est produit sous le sommet michon2011. Ce séisme est accompagné d'une déflation importante, durant une minute, enregistrée par inclinométrie puis suivie par une déflation de deux minutes [Staudacher et al.(2009)]. Cet événement marque le début d'une série de 44 cycles d'intensification du trémor provenant du sommet du volcan [Michon et al.(2011)] : chaque cycle est caractérisé par une augmentation de l'amplitude du trémor accompagnée par une déflation du sommet jusqu'au déclenchement d'un événement sismique de forte amplitude couplé à une brutale inflation sommitale (Fig. 7.2) [Staudacher et al.(2009),Michon et al.(2007b),Michon et al.(2011)]. La fin de la plupart des cycles est marquée par l'émission d'un nuage de cendres ou de poussières au sommet du volcan et par une chute brutale de l'amplitude du trémor. La fréquence de ces cycles augmente progressivement du 5 au 6 avril : les cycles durent deux heures le 5 avril puis une trentaine de minutes en fin de journée le 6 avril, avant de devenir de moins en moins marqués et plus irréguliers. Le phénomène s'arrête le 7 avril.
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Cette cyclicité du trémor et de la déformation accompagne l'effondrement du Dolomieu sur 340 mètres de hauteur staudacher2009. Le volume de l'effondrement est estimé à 110 Mm3 par [Urai et al.(2007)] à partir d'images ASTER. L'effondrement est corrélé à une forte augmentation de la hauteur des fontaines de lave michon2007b, staudacher2009 puis à une émission d'océanites.
À la suite de l'effondrement, l'intensité du trémor diminue progressivement. Le 10 avril à 10h00 TU, le trémor éruptif a pratiquement disparu. L'éruption reprend six heures après, accompagnée par un trémor irrégulier et par l'émission de gaz pistons du 15 au 19 avril, pendant lesquels le débit de lave est estimé à plus de 200 m3.s-1. Cette éruption de 27 jours s'est terminée le 29 avril avec l'émission de picrite.
Le volume de la coulée est estimé à 90 Mm3 pour sa partie aérienne staudacher2009 et à 90 Mm3 pour sa partie sous-marine [Saint-Ange et al.(2009)], soit un volume total de 180 Mm3, ce qui représente le plus grand volume de lave émis pendant la période historique de l'activité du Piton de la Fournaise. L'effondrement a été suivi d'une sismicité profonde, pouvant atteindre -7 km au début du mois de mai. Cette sismicité s'est prolongée après la fin de l'éruption. Plusieurs séismes locaux ont été enregistrés sous la partie sud-ouest de la Réunion, l'un d'eux ayant eu une magnitude de 3,6 le 26 août.
Le 11 mai, l'OVPF (Observatoire Volcanologique du Piton de la Fournaise) signale une légère reprise du trémor qui ne sera pas associée à une reprise de l'éruption. Cependant, la déflation du cône central s'intensifie [(Rapport OVPF, 2007)] et continuera en s'amortissant jusqu'en juin 2008.
Deux modèles conceptuels de l'éruption ont été proposés par [Peltier et al.(2009b)] et par [Staudacher et al.(2009)]. Ces deux modèles proposent la présence d'une chambre magmatique unique localisée au niveau de la mer (Fig. 7.3). Cette chambre permet d'expliquer l'apparente concordance entre les volumes de lave émis et le volume de l'effondrement. D'autre part, ces deux modèles expliquent l'augmentation du débit de lave au niveau de la fissure d'avril par un mécanisme de piston : l'effondrement aurait permis à la colonne de roche de faire augmenter la pression dans la chambre magmatique. Cette augmentation de la pression aurait permis un brassage du magma dans la chambre, permettant l'émission des cumulats de base de chambre (océanites).
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Le modèle de [Peltier et al.(2009b)] propose l'existence d'un dyke unique afin de rendre compte de l'alignement apparent des deux fissures éruptives, alors que le modèle de [Staudacher et al.(2009)] suppose la présence de deux injections différentes. Ce dernier modèle est en accord avec l'étude de [Massin et al.(2011)] qui propose une injection d'un dyke lors de l'éruption du 30 mars et l'injection d'un sill pour l'éruption du 2 avril.
kunos 2014-07-01